" « l'Irlande jusqu'aux Barbades lointaines1. Avance « tous les jours plus loin dans la sottise et l'impudence; d'autres t'enseigneront le succès; apprends « de moi le travail infécond, les accouchements avor«tés 2. Ta muse tragique fait sourire, ta muse comique fait dormir. De quelque fiel que tu charges « ta plume, tes satires inoffensives ne peuvent jamais « mordre. Quitte le théâtre, et choisis pour régner quelque paisible province dans le pays des acro « « Rome's other hope, and pillar of the state; Sworn by his sire a mortal foe to Rome, So Shadwell swore, nor should his vow be vain, He placed a mighty mug of potent ale. 1. Iles où l'on transportait les condamnés. 2. <«< Heav'n bless my son, from Ireland let him reign, Of his dominion may no end be known, And greater than his father's be his throne;.... Yet not one thought accuse thy toil of wit. astiches. Ainsi se déploie l'insultante mascarade, non point étudiée et polie comme le Lutrin de Boileau, mais pompeuse et crue, poussée en avant par un souffle brutal et poétique, comme on voit un grand navire entrer dans les bourbes de la Tamise, toutes voiles ouvertes et froissant l'eau. VIII C'est dans ces trois poëmes que le grand art d'écrire, signe et source de la littérature classique, apparut pour la première fois. Un nouvel esprit naissait et renouvelait l'art avec le reste; désormais et pour un siècle, les idées s'engendrent et s'ordonnent par une loi différente de celle qui jusqu'alors les a formées. Sous Spencer et Shakspeare, les mots vivants 1. « Like mine, thy gentle numbers feebly creep; In thy felonious heart though venom lies, Leave writing plays, and choose for thy command comme des cris ou comme une musique faisaient voir l'inspiration intérieure qui les lançait. Une sorte de vision possédait l'artiste; les paysages et les événements se déroulaient dans son esprit comme dans la nature; il concentrait dans un éclair tous les détails et toutes les forces qui composent un être, et cette image agissait et se développait en lui comme l'objet hors de lui; il imitait ses personnages, il entendait leurs paroles; il trouvait plus aisé de les répéter toutes palpitantes que de raconter ou d'expliquer leurs sentiments; il ne jugeait pas, il voyait; il était involontairement acteur et mime; le drame était son œuvre naturelle, parce que les personnages y parlent et que l'auteur n'y parle pas. Voici que cette conception complexe et imitative se décolore et se décompose; l'homme n'aperçoit plus les choses d'un jet, mais par détails; il tourne autour d'elles pas à pas, portant sa lampe tour à tour sur toutes leurs parties. La flamme qui d'une seule illumination les révélait s'est éteinte; il remarque des qualités, il note des points de vue, il classe des groupes d'actions, il juge et il raisonne. Les mots, tout à l'heure animés et comme gonflés de séve, se flétrissent et se sèchent; ils deviennent abstraits; ils cessent de susciter en lui des figures et des paysages; ils ne remuent que des restes de passions affaiblies; ils jettent à peine quelques lueurs défaillantes sur la toile uniforme de sa conception ternie; ils deviennent exacts, presque scientifiques, voisins des chiffres, et, comme les chiffres, ils se disposent en séries, alliés par leurs analogies, les premiers plus simples conduisant aux seconds plus composés, tous du même ordre, en telle sorte que l'esprit qui entre dans une voie la trouve unie et ne soit jamais contraint de la quitter. Dès lors une nouvelle carrière s'ouvre l'homme a le monde entier à repenser; le changement de sa pensée a changé tous les points de vue, et tous les objets vont prendre une nouvelle forme dans son esprit transformé. Il s'agit d'expliquer et de prouver; c'est là tout le style classique, c'est tout le style de Dryden. Il développe, il précise, il conclut; il annonce sa pensée, puis la résume, pour que le lecteur la reçoive préparée, et, l'ayant reçue, la retienne. Il la fixe en termes exacts justifiés par le dictionnaire, en constructions simples justifiées par la grammaire, pour que le lecteur ait à chaque pas une méthode de vérification et une source de clarté. Il oppose les idées aux idées, et les phrases aux phrases, pour que le lecteur, guidé par le contraste, ne puisse dévier de la route tracée. Vous devinez quelle peut être la beauté dans une pareille œuvre. Cette poésie n'est qu'une prose plus forte. Les idées plus serrées, les oppositions plus marquées, les images plus hardies, ne font qu'ajouter de l'autorité au raisonnement. La mesure et la rime transforment les jugements en sentences. L'esprit, tendu par le rhythme, s'étudie davantage, et arrive à la noblesse par la réflexion. Les jugements s'enchâssent en des images abréviatives ou en des lignes symétriques qui leur donnent la solidité et la popularité d'un.dogme. Les vérités générales attei gnent la forme définitive qui les transmet à l'avenir et les propage dans le genre humain. Tel est le mérite de ces poëmes: ils plaisent par leurs bonnes expressions'. Sur un tissu plein et solide se détachent des fils habilement noués ou éclatants. Ici Dryden a rassemblé en un vers un long raisonnement; là une. métaphore heureuse a ouvert sous l'idée principale une perspective nouvelle 2; plus loin deux mots semblables collés l'un contre l'autre ont frappé l'esprit d'une preuve imprévue et victorieuse; ailleurs une comparaison cachée a jeté une teinte de gloire ou de honte sur le personnage qui ne s'y attendait pas. Ce sont toutes les adresses et les réussites du style calculé, qui rend l'esprit attentif et le laisse persuadé ou convaincu. 1. Strong were our sires, and as they fought they writ, 2. 3. And thus, when Charles return'd, our empire stood. Held up the buckler of the people's cause Why then should I, encouraging the bad, |