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encore néceffaire que les points fur lefquels les deux parties font en litige foient fuffi famment éclaircis. Or rien de plus propre à jetter du jour fur une caufe, que le tems, la lenteur & les fréquentes informations. Par toutes ces raifons, il faut que ceux qui ont enfemble quelque différend, s'adreffent d'abord à leurs voifins, à leurs amis, à tous ceux qui peuvent être au fait. du fujet de la conteftation. Si la chofe n'eft pas fuffifamment décidée par ces arbitres, on aura recours à un autre tribunal. Enfin fi. le procès ne peut fe vuider dans ces deux premiers tribunaux, un troifeme le terminera fans appel. Au reste l'érection des tribunaux eft en quelque forte. une création de Magiftrats: puisqu'il eft néceffaire que le Magiftrat foit Juge en certaines matieres, & que le Juge, fans être Magiftrat, l'est cependant avec une autorité confidérable, le jour qu'il termine. les différends par fa fentence. (8) Ainfi

(8) Les anciens, foit Grecs, foit Latins, ne confon-doient pas le Juge avec le Magiftrat; & quoiqu'en France ces deux termes paroiffent fynonymes, cependant la différence effentielle du Magiftrat & du Juge eft que.. l'objet du premier font les affaires d'Etat, & celui de fecond, les affaires des particuliers.

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comptant les Juges pour des Magiftrats, difons quelque chofe de leurs qualités perfonnelles, des matieres qui font de leur compétence, & du nombre des Juges dans chaque tribunal.

QUE le plus facré de tous les tribunaux foit celui que les parties fe feront créé elles-mêmes, & qu'elles auront élu d'un commun confentement. Outre celui-là, il y en aura deux d'établis, l'un pour juger les caufes de particulier à particulier, lorfqu'un citoyen fe prétendant léfé dans fes droits par un autre, le citera devant les Juges pour en avoir raison: l'autre pour les cas où par zêle pour le bien public, on voudra dénoncer ceux qu'on croira avoir nui aux intérêts de · PEtat.

Il nous faut parler de la qualité & du choix des Juges. Le premier tribunal, ou vert à tous les particuliers qui, après avoir plaidé deux fois, n'auront pu s'accorder, fera formé de cette maniere. Le dernier jour avant le mois qui fuit le folftice d'été, auquel mois commence la nouvelle année, tous ceux qui ont des charges, foit pour un an feulement, foit pour plus longtems,

s'af

fembleront dans un des temples de la Cité;; & là, après avoir pris le Dieu à ferment, ils lui offriront en quelque forte les prémices de tous les corps de Magiftrature, choififfant pour Juge dans chacun celui qui jouira d'une plus grande réputation de probité, & feur paroîtra devoir rendre la justice aux citoyens avec plus de lumieres & d'intégrité dans le cours de l'année fuivante. Ce choix fera fuivi de l'examen de chacun des élus,. & fi quelqu'un eft rejetté, on lui en fubftituera un autre en gardant les mêmes formes. Ces Juges prononceront entre ceux qui n'au-ront pu s'accorder dans les autres tribu naux ; ils donneront leur voix publiquement; les Sénateurs & tous les autres Magiftrats qui les ont élus, feront tenus d'affifter au jugement, & d'être témoins de la fentence:. pour les autres citoyens, ils y affifteront, fi bon leur femble. Si un Juge se trouvoit ac-cufé d'avoir porté fciemment une fentence injufte, l'accufation fera portée devant les Gardiens des loix; le Juge convaincu de cette malversation, fera condamné à payer à celui auquel il a fait tort, la moitié du dom mage; ou, fi l'on croit qu'il mérite une plus

grande peine, elle fera laiffée à la difcrétion des Gardiens des loix, qui eftimeront ce qu'il doit fouffrir en outre, foit dans fa perfonne, foit dans fes biens, par une amende au profit du public ou du particulier qui a porté la plainte..

A L'ÉGARD des crimes d'Etat, il eft néceffaire que le peuple ait part au jugement; puifque tous les citoyens font léfés, lorfque l'Etat l'eft; & qu'ils auroient raifon de trouver mauvais qu'on les exclût de ces fortes de caufes. Ainfi ce fera au peuple que ces caufes feront portées en premiere inftance, & il les décidera en dernier reffort: mais la procédure s'inftruira par devant trois des premiers corps de Magiftrature, choifis du commun confentement de l'accufateur & de l'accufé. S'ils ne peuvent convenir fur ce choix, le Sénat le réglera en décidant pour l'un ou pour l'autre. Il faut encore, autant qu'il fe pourra, que tous ayent part aux ju gemens touchant les caufes privées. Car ceux qui fe voyent exclus de tout droit de juger, s'imaginent qu'ils font comptés pour rien dans l'Etat. C'eft pourquoi il eft néceffaire qu'on établisse des tribunaux pour

chaque tribu, & que des Juges incorrupti bles & inacceffibles aux prieres nommés par le fort, décident fur le champ les différends qui s'éleveront. La décifion finale de ces fortes de caufes fe prononcera dans le tribunal dont nous avons parlé plus-haut, tribunal compofé des Juges les plus integres qu'il foit poffible de trouver parmi les hommes, & destiné a terminer les procès qui n'auront pû être vuidés par une fentence arbitrale, les Juges de la tribu.

ni

par

VOILÀ Ce que j'avois à dire pour le préfent des Juges, au fujet defquels il est également difficile de décider que ce font ou que ce ne font pas des Magiftrats. Je ne fais au refte que tracer ici en quelque forte l'enceinte de leurs fonctions, en marquant une partie, & paffant le refte fous filence. Lorfque nous ferons parvenus au terme de nôtre légiflation, nous donnerons un plan & un. détail beaucoup plus exact des loix qui concernent l'ordre judiciaire. Ainfi nous attendrons à ce moment à reprendre cette matiere. Pour ce qui regarde l'inftitution des autres charges publiques, nous avons réglé peu-près tout ce qu'il y a à régler. Mais

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