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d'housards dans toutes les directions jusqu'à deux marches, et parfaitement informés de tout ce qui ce fait, en instruire le quartier général, de manière que si l'ennemi se présente en force sur Burgos, les différentes divisions puissent à temps s'y porter pour le soutenir et livrer la bataille, ou si cela n'est pas jugé convenable, éclairer les mouvemens de l'ennemi, lui laisser croire qu'on veut se porter sur Burgos, et pouvoir ensuite faire sa retraite pour se porter ailleurs.

Un corps de 12 à 15 mille hommes ne prend-il pas 20 positions dans la journée au seul commandement d'un adjudant major? et nos troupes seraient-elles devenues des levées en masse, qu'il faudroit placer 15 jours d'avance dans les positions où on voudroit qu'elles se battent?

Si cela eut été jugé ainsi, le corps du maréchal Bessières eut pris la position de Miranda ou de Briviesca; mais lorsque l'ennemi est encore à Madrid, lorsqu'on ignore où est l'armée de Galice, et qu'on a le soupçon que les rebelles pourront employer une partie de leurs efforts contre le Portugal, prendre, au lieu d'une position menaçante, offensive, honorable comme Burgos, une position honteuse, borgne comme Trevino, c'est dire à l'ennemi, “Vous n'avez rien à craindre; portez vous ailleurs; nous avons fait nos dispositions pour aller plus loin, ou bien nous avons choisi un champ de bataille pour nous battre; venez ici, vous ne craignez pas d'être inquiétés." Mais que fera le général Français, si l'on marche demain sur Burgos? laissera-t-il prendre par 6,000 insurgés la citadelle de cette ville, ou si les Français ont laissés garnison dans le château (car on ignore la position et la situation de l'armée), comment une garnison de 4, 6, ou 800 hommes se retira-t-elle dans une si vaste plaine? Et des lors c'est comme s'il n'y avoit rien: l'ennemi maître de cette citadelle, on ne la reprendra plus.

Si, au contraire, on veut garder la citadelle, on veut donc livrer bataille à l'ennemi; car cette citadelle ne peut pas tenir plus de trois jours; et si on veut livrer bataille à l'ennemi, pourquoi le ma' Bessières abandonne-t-il le terrein où on veut livrer bataille?

Ces dispositions paraissent mal raisonneés, et quand l'ennemi marchera on fera essuyer à l'armée un affront qui demoralisera les troupes, n'y eut-il que des corps lègers ou des insurgés qui marchassent.

En résumé, la position de Burgos devait être gardée; tous les jours à trois heures du matin on devait être sous les armes, et à une heure du matin il devait partir des reconnaissances dans toutes

les directions. On devait ainsi recueillir des nouvelles à huit ou dix lieux à la ronde, pour qu'on peut prendre ensuite le parti que les circonstances indiqueraient.

C'est la première fois qu'il arrive à une armée de quitter toutes les positions offensives, pour se mettre dans de mauvaises positions défensives, d'avoir l'air de choisir des champs de bataille, lorsque l'éloignement de l'ennemi, les mille et une combinaisons différentes qui peuvent avoir lieu, ne laissent point la probabilité de prévoir si la bataille aura lieu à Tudela, entre Tudela et Pampelune, entre Soria et l'Ebre, ou entre Burgos et Miranda.

La position de Burgos, tenue en force et d'une manière offensive, menace Palencia, Valladolid, Aranda. Madrid même. Il faut avoir longtems fait la guerre pour la concevoir; il faut avoir entrepris un grand nombre d'operations offensives pour savoir comme le moindre événement ou indice encourage ou décourage, décide une opération ou une autre.

En deux mots, si 15 mille insurgés entrent dans Burgos, se retranchent dans la ville, et occupent le château, il faut calculer une marche de plusieurs jours pour pouvoir s'y poster et reprendre la ville; ce qui ne sera pas sans quelque inconvenient; si pendant ce tems-là la veritable attaque est sur Logrono ou Pampelune, on aura fait des contremarches inutiles, qui auront fatigué l'armée; et enfin, si l'ennemi occupe Logrono, Tudela, et Burgos, l'armée Française serait dans une triste et mauvaise position.

Quand on tiens à Burgos de la cavalerie sans infanterie, n'estce pas dire à l'ennemi qu'on ne veut pas y tenir; n'est-ce pas l'engager à y venir? Burgos a une grande influence dans le monde par son nom, dans la Castille parceque c'en est la capitale, dans les opérations parcequ'elle donne une communication directe avec St. Ander. Il n'est pas permis à 300 lieues, et n'ayant pas même un état de situation de l'armée, de prescrire ce qu'on doit faire; mais on doit dire que si aucune force majeure ne l'empêche, il faut occuper Burgos et Tudela.

Le corps detaché de Tudela a son mouvement assuré sur Pampelune, a la rôle de garder la Navarre, a ses ennemis à tenir en échec, Saragosse et tous les insurgés. Il était plus que suffisant pour surveiller Tudela, l'Ebre, et Pampelune, pour dissiper les rassemblemens s'il n'y avait que des insurgés, contenir l'énnemi, donner des renseignemens, et retarder la marche sur Pampelune. Si au lieu des insurgés, c'est l'armée ennemie qui marche de ce côté, il suffit encore pour donner le tems à l'armée de Burgos, à celle de

Miranda, de marcher réunie avec 36 mille hommes, soit pour prendre l'offensive, soit pour prendre en flanc l'ennemi qui marche sur Pampelune, soit pour se replier et rentrer dans la Navarre, si toute l'armée ennemie avait pris cette direction.

Si ces observations paraissent bonnes et qu'on les adopte, que l'ennemi n'ait encore montré aucun plan, il faut que le général qui commande le corps de Sarragosse fasse construire quelque redoutes autour de Tudela, pour favoriser ses champs de bataille, réunisse des vivres de tous les côtés, et soit là dans une position offensive sur Sarragosse en maintenant sa communication avec Logrono par sa droite, mais au moins par la rive gauche de l'Ebre. Il faut que le maréchal Bessières, avec tout son corps, renforcé de la cavalerie légère, soit campé dans le bois près Burgos, la citadelle bien occupée; que tous les hôpitaux, les dépôts, les embarras soient au delà de l'Ebre; qu'il soit là en position de manœuvrer, tous les jours, à trois heures du matin, sous les armes, jusqu'au retour de toutes les reconnaissances, et eclairant le pays dans la plus grande étendue ; que le corps du ma' Moncey soit à Miranda et à Briviesca, tous ses embarras et hôpitaux derrière Vittoria, toujours en bataille avant le jour, et envoyant des reconnaissances sur Soria et les autres directions de l'ennemi.

Il ne faut pas perdre de vue que les corps des maréchaux Bessières et Moncey, devant être réunis, il faut se lier le moins possible avec Logrono, et cependant considérer le corps du général Lefebre comme un corps détaché, qui a une ligne d'operation particuliere sur Pampelune et un rôle séparé; vouloir conserver Tudela comme une partie contigue de la ligne, c'est se desseminer beaucoup. Enfin, faire la guerre, c'est à dire, avoir des nouvelles. par les curés, les alcaldes, les chefs de couvent, les principaux proprietaires, les postes: on sera alors parfaitement informé.

Les reconnaissances qui tous les jours se dirigeront du côté de Soria, de Burgos, sur Palencia, et du côté d'Aranda, peuvent former tous les jours trois postes d'interception, trois rapports d'hommes arrêtés, qu'on traitera bien, et qu'on rélachera quand ils auront donné les renseignemens qu'on desire. On verra alors venir l'ennemi, on pourra réunir toutes ses forces, lui dérober des marches, et tomber sur ses flancs au moment ou il meditera un projet offensif.

3me Observation.-L'armée Espagnole d'Andalousie étoit peu nombreuse. Toutes les Gazettes Anglaises, et les rapports de l'officier Anglais qui était au camp, nous le prouvent. L'inconcevable ineptie du général Dupont, sa profonde ignorance des calculs d'un général en chef, son tâtonnement, l'ont perdu.

18 mille hommes ont posé les armes, six mille seulement se sont battus, et encore ces 6000 hommes que le gen' Dupont a fait battre à la pointe du jour, après les avoir fait marcher toute la nuit, étaient un contre trois. Malgré tout cela, l'ennemi c'est si mal battu, qu'il n'a pas fait un prisonnier, pris une pièce de canon, gagné un pouce de terrein, et l'armée de Dupont est restée intacte dans sa position; ce qui sans doute a été un malheur; car il eût mieux valu que cette division eût été mise en déroute, éparpillée, et détruite, puisque les divisions Vedel et Dufour, au lieu de se rendre par la capitulation, auraient fait leur retraite. Comment ces deux divisions ont-elles été comprises dans la capitulation? c'est par la lacheté insultante et l'imbécilité des hommes qui ont négocié, et qui porteront sur l'échaffaud la peine de ce grand crime national.

Ce que l'ont vient de dire prouve que les Espagnols ne sont pas à craindre; toutes les forces Espagnols ne sont pas capables de culbuter 25 mille Français, dans une position raisonnable.

Depuis le 12 jusqu'au 19, le général Dupont n'a fait que des bêtises, et malgré tout cela, s'il n'avait pas fait la faute de se séparer de Vedel, et qu'il eût marché avec lui, les Espagnols auraient été battus et culbutés. A la guerre les hommes ne sont rien, c'est un homme qui est tout. Jusqu'à cette heure nous n'avons trouvé ces exemples que dans l'histoire de nos ennemis : aujourd'hui, il est fâcheux que nous puissions les trouver dans la nôtre.

Une rivière, fût-elle aussi large que la Vistule, aussi rapide que le Danube à son emboucheur, n'est rien si on n'a des debouchés sur l'autre rive, et une tête prompte à reprendre l'offensive. Quand à l'Ebre, c'est moins que rien; on ne la regarde que

comme une trace.

Dans toutes ces observations, on a parlé dans la position où se trouvait l'armée du 20 au 26, lorsqu'elle n'avait nulle part nouvelle de l'ennemi.

Si on continue à ne prendre aucune mésure pour avoir des nouvelles, on n'apprendra que l'armée de ligne Espagnol est arrivée sur Tudela et Pampelune, qu'elle est sur les communications, sur Tolosa, que lorsqu'elle y sera déjà rendue. On a fait connaître dans la note précédente comment on faisait à la guerre pour avoir des nouvelles. Si la position de Tudela est occupée par l'énnemi, on ne voit pas que l'Ebre soit tenable. Comment a-t-on évacué Tudela, lorsqu'on avait mandé dans des notes précédentes qu'il fallait garder ce point, et que l'opinion même des

généraux qui venaient de Sarragosse étaient d'occuper cette importante position.

Dictated by Napoleon. Taken at Vittoria.

No. V.

NOTE SUR LES AFFAIRES D'ESPAGNE.

St. Cloud, Août, 1808.

1ere Observation.-Tudela est importante sous plusieurs points de vue: il a un pont sur l'Ebre, et protège parfaitement la Navarre: c'est le point d'intersection du canal qui va à Sarragosse.

Les convois d'artillerie et de vivres mettent pour se rendre de Pampelune à Tudela trois jours, de Tudela à Sarragosse trois jours. Mais en se servant du canal, on va de Tudela à Sarragosse en 14 heures. Lorsque donc les vivres, les hôpitaux, sont à Tudela, c'est comme s'ils étaient à Sarragosse.

La première opération qui doit faire l'armée lorsqu'elle reprendra son système d'offensive, et qu'elle sera forte de tous ses moyens, ce doit être d'invester et de prendre Sarragosse; et si cette ville resiste comme elle l'a fait la première fois, en donner un exemple qui retentisse dans toute l'Espagne.

Une vingtaine de pièces de 12 de campagne, une vingtaine d'obsusiers de six pièces de campagne, une douzaine de mortières, et une douzaine de pièces de 16 et de 24, parfaitement approvisionée, seront nécessaires, ainsi que des mineurs pour remplir ce but.

Il n'est aucun de ces bouches de feu qui doive consommer son approvisionement de campagne.

Un approvisionement extraordinaire de 80 mille coups de canon, bombes ou obus, parait nécessaire pour prendre cette ville.

Il faudrait donc, pour ne pas retarder la marche de la grande armée, 15 jours avant qu'elle ne puisse arriver, commencer le transport de Pampeluna à Tudela, et que dans les 48 heures après l'investissement de Sarragosse, l'artillerie y arrivât sur des bâteux, de manière que quatre jours après on put commencer trois attaques à la fois, et avoir cette ville en peu de jours, ce qui serait une partie des succès, en y employant 25 à 30 mille hommes, ou plus s'il était nécessaire.

On suppose que, si l'ennemi a pris position entre Madrid et Burgos, il aura été battu.

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