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contrait deux grandes oppositions : en Orient Photius, Hincmar en Occident.

L'histoire est encore presque entièrement ecclésiastique; mais ses monumens sont plus nombreux. Frodoard de Reims, Réginon, abbé de Prom, appartiennent à cette époque. Le peuple n'a pas d'historien: le peuple n'existe pas encore.

Tel que nous l'avons envisagé, ce siècle fut donc un progrès. Il continua l'œuvre de la régénération intellectuelle, et il eut assez de force non-seulement pour empêcher l'entière décadence des lettres, mais encore pour donner quelque degré de perfection aux sciences alors en usage, et en ressusciter quelques autres. Telle est la conclusion des auteurs de l'histoire littéraire : cette conclusion est juste.

Ce mouvement intellectuel tenait à un changement politique, à un progrès national.

La dynastie capétienne, la dynastie du sol, portée sur le trône, trouva au sein du peuple un appui qui lui était nécessaire contre les envahissemens de cette féodalité qui avait vaincu les Carlovingiens. Comme les Carlovingiens, mais avec plus de bonheur, d'habileté et de courage, elle demanda à la nation gauloise, à la nation savante, à l'esprit ecclésiastique, opposition naturelle à l'esprit féodal, une force

qui devait défendre la jeune royauté et consolider sa victoire sur les Francs. De là la protection accordée aux études par Hugues Capet, par Robert le Pieux; de là, plus tard, les priviléges des universités, les libertés gallicanes : double rempart entre l'Église et la féodalité, qui, longtemps divisées, se réuniront dans une commune défense contre un péril commun, la monarchie.

CHAPITRE VIII.

Irlande. Écoles italienne et normande. — Bède.

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CE mouvement nouveau de la France lui était venu du dehors; il partait de l'Irlande et de l'Italie.

Au septième siècle, l'état intellectuel de l'Irlande et de l'Angleterre était bien supérieur à celui du continent. Les lettres et les écoles y étaient florissantes, surtout l'école d'York, qui possédait une riche bibliothèque, et, entre autres ouvrages de l'antiquité païenne, ceux d'Aristote. La grammaire, la rhétorique, la jurisprudence, l'astronomie, l'histoire naturelle, les mathématiques, la chronologie et l'explication des saintes Écritures formaient le fond de l'enseignement.

L'Angleterre et l'Irlande avaient dû à leur position géographique cet avantage d'avoir moins souffert de la barbarie. A l'abri des invasions, elles conservèrent mieux le goût de l'étude et les monumens de la science; les écoles et les monastères n'y furent point détruits ou

dispersés. La bibliothèque de Croyland contenait plus de trois cents volumes avant l'incendie qui la dévora en 1091. Saint Augustin, en portant la foi dans l'Angleterre, y porta aussi les lumières de l'Italie. Vers l'an 670, Théodoric, aidé de Bennet Biscop, jeune Saxon, voulant répandre les lumières de l'Évangile sur les Bretons, qui, obligés de fuir devant les Saxons, avaient emporté dans les montagnes de Galles leur foi, leur discipline et leur liberté, et caché dans le monastère de Cangor le dépôt de leurs anciennes connaissances, apporta avec lui beaucoup de livres grecs et latins, entre autres, un bel exemplaire d'Homère et les Homélies de saint Chrysostôme. Successeur de Théodore, Albin joignit à la littérature sacrée la littérature grecque et latine. Bède, qui devina la cause des marées, continua cette école de science et de vertu dont l'influence pénétra en France avec Alcuin, et renouvela ces relations intellectuelles depuis long-temps établies entre les Gaules et la Grande-Bretagne.

Les écoles d'Angleterre furent donc le foyer où s'alluma la faible étincelle qui éclaira la France. Alcuin, qui fut l'âme des écoles de Charlemagne, avait été élève d'Egbert, archevêque d'York. Alfred, fondateur ou restaurateur de l'école d'Oxford, ferma d'une manière

brillante le siècle que Charlemagne avait ouvert avec tant d'éclat. Il traduisit en langue saxone l'Histoire ecclésiastique de Bède, le Pastoral de saint Grégoire le Grand, les livres de la Consolation de Boëce, et l'Histoire d'Orose, Les successeurs d'Alfred, comme ceux de Charlemagne, soutinrent avec zèle les écoles formées par ce prince.

Cette gloire d'une science moins barbare n'appartenait pas entièrement à l'Angleterre elle aussi, nous l'avons dit, l'avait reçue de l'Italie. L'Italie avait mieux qu'aucun autre pays conservé les traces de la civilisation romaine et des études classiques. Les Goths Ꭹ avaient laissé et même ranimé le goût des arts et des lettres. Cassiodore, secrétaire de Théodoric; Priscien, dont les ouvrages furent le manuel du moyen âge; Boëce, qui légua à la liberté l'hommage de ses fers; Martianus Capella, qui servit au moyen âge de guide pour la philosophie comme Priscien pour la grammaire, tous ces hommes d'un goût altéré, mais d'un esprit supérieur cependant, forment au cinquième siècle la littérature de l'Italie, qui, un peu plus tard, nous montre encore. Ennodius, orateur guindé, mais d'une imagination brillante. Sur le sol classique de l'Italie, la langue de Cicéron et de Virgile continua,

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