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Diderot...

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S. B. VH, S. 210. Schon sein großer Antheil an der Franzosischen Encyklopädie giebt ihm einen anfehulichen Rang unter den abhandelnden Schriftstellern seiner Nation. Die Aufs fäße, welche in feinen moralischen, auch ins Deutsche übersegs ten Werken enthalten find, haben sämmtlich das Gepräge eines frei und cdel denkenden Geistes, und das heitre, blühende Kolorit ihrer Schreibart macht sie doppelt anziehend für den Leser. Der erfte Theil dieser Schriften hat durchgehends die Freundschaft zum Gegenstande, deren Eigenschaften und Erweisungen nach der Verschiedenheit der Lebensverhältnisse, Stände und Alter, und nach der eben so verschiedenen Natur ihrer Quellen und Triebfes dern durchgegangen werden. Folgender sechszehnter Abschnitt bes trift die Freundschaft der Gelehrten.

DE L'AMITIE DES GENS DE LETTRES.

les autres.

Je crois avoir déjà dit dans quelque endroit de cet ouvrage que les hommes retirés et ftudieux étoient plus propre à l'amitié que D'après ce principe, il n'y a pas de doute que ce ne foit chez les Sçavans qu'on doive trouver les amis les plus parfaits; aussi estce parmi eux qu'on en trouve les modéles les plus accomplies *). Les fiecles paffés nous en ont fourni plus d'exemple que le notre: les vrais Sçavans étoient moins

rares

*) On me dira, fans doute, que parmi les querelles litteraires, celles des fçavans font les plus vives et les plus opiniâtres; que nos Bibliotheques font pleines de Libelles les plus diffamans et des injures les plus groffieres; monumens scandaleux de la haine de plufieurs fçavans du premier ordre: mais quelques exceptions fur une regle presque generale ne doivent pas détruire les principes que j'ai établis; et l'amitié auffi celèbre que conftante des gens les plus illuftres dans les sciences, doit nous faire aifément oublier ces empruntes de l'humanité, dans des hommes fi dignes d'ailleurs de nos éloges et de notre veneration.

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rares alors; on fe contente à present de le paroître, et l'on le foucie fort peu de l'être en effet. Ces hommes illuftres étoient d'autant plus refpectés, qu'ils ne proftituoient point la fcience en voulant la mettre å la portée de tout le monde: la manie du bel efprit ne & étoit point encore emparé d'eux; et ils préferoient Pavantage d'être utiles, au plaifir de briller au milieu d'un cercle frivole qui fe croit capable de juger du touf, quoiqu'il ne le connoiffe à rien. Comme les veritables Sçavans travaillent plutôt pour la Satisfaction qu'ils trouvent à s'inftruire, que pour le rendre recommendables, ils font bien moins fujets à cette balle jaloufie qu' engendre la vanité, et qui prouve, qu'on eft bien plus avide de réputation que de connoiffances: ce defir effréné d'occuper le Public, ne leur fait point trouver un rival dans un homme même plus fçavant qu'eux; c'est une raifon de plus au contraire pour le rechercher. Ils puifent dans fon entretien de nouvelles connoil fances, ils y éclairciffent leurs doutes: on le fait difciple fans peine, quand on eft digne d'ètre maître. II n'y a que les ignorans auxquels on ne peut rien apprendre: ils fçavent tout. Les liaifons fondés fur le rapport des gouts et des occupations font les plus agreables de toutes et les plus durables; et de tous les goûts, il n'y en a point qui fourniffe plus de reffource à l'amitié que l'étude. Comme les paffions ne s'emparent guéres que des gens oififs, ceux qui font fortement occupés, en font exempts pour l'ordinaire. Leur fentiment n'est point altéré par elles; il n'y a point de lacune dans leur amitié; elle eft toujours la même; et leur eftime reciproque ne fert qu' à Paccroitre. Ils n'ont point de defirs; leur ambition n'a pour objet que d'acquerir de nouvelles lumiéres, et le vil interet leur eft inconnu. Les richeffes font inutiles au fage; il les méprise, et ne les regarde que comme l'aliment des paffions. Les befoins

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befoins n'ont point de bornes quand le fuperflu en fait partie; et l'ennui des gens défoeuvres, leur en crée à chaque inftant; mais quand le luxe est banni, le néceffaire exige peu. Un homme inftruit et vertueux trouve fon bien-être dans lui-même: un ami n'est pour lui, ni protecteur ni un confident, ni un rempliffage; c' eft un émule, mais un émule chéri; c'est un autré lui-même; et comme il ne connoit pas les befoins d'un coeur honnête, un ami fuffit pour le remplir. Ce coeur n'est point blasé par l'ivreffe des paffions; fon aine a toute fa candeur et fa fermeté. Sans intrigue et fans cabale, le Sage jouit en paix du fruit de fes veilles; il fe croit heureux; il l'eft en effet: fon bonheur ne dépend point des décifions inconfidérées des gens à prétentions; il n'écrit pas pour eux, il en fait trop peu de cas pour s'en occuper; il fe fuffit à lui-même; l'étude et l'amitié partagent les jours, et concourent à l'envi à faire fa félicité.

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Il n'en eft pas de même des beaux Esprits de profeffion; c'eft une nation turbulente et inquiete, qui n'a d'existence que par l'opinion des autres, et d'amis que ceux qui les admirent: mais un sentiment qui n'eft fondé que fur la vanité eft bien fragile, et ne peut durer qu'autant qu'elle eft fatisfaite; auffi la plus légere cenfure le détruit-elle aifément. Le bel efprit méprise la science et les fçavans; mais il veut cependant qu'on le croie fur la parole, quand il s'agit d'érudition, quoiqu'il avoue ingénuement qu'il n'en fait pas affez de cas pour s'en être jamais occupé. Ces êtres frivoles font comme les grands feigneurs, ils fçavent tout fans avoir rien appris, et croient que la fagacité de leur esprit doit fuffire pour leur faire concevoir en un inftant, ce qu'à peine l'etude la plus opiniàtre a pu

développer à ceux qui s'y font consacrés dès leur jeunelle. Ils tournent en ridicule ces hommes refpectables par leurs talens et leur vertu, qui passent leur vie dans l'obfcurité, pour pouvoir un jour éclairer l'Univers, et se rendre dignes par des ouvrages immortels d'une réputation d'autant plus méritée, qu'ils s' empressent moins d'en jouir. Ce font, difent-ils, de ftupides Erudits, qui, en s'appésantissant sur un calcul, fur un fait ou fur une date, prouvent qu'ils ne font bons qu'a rédiger ce qu'on pense; mais qui ne penfent point; que leur esprit n'est propre qu' à observer ou à combiner, et jamais à créer; ils ne répondent à un argument fait pour les confondre, que par des épigrammes. Un bon mot fert de folutions aux problèmes les plus difficiles à réfoudre: et la plaifanterie dédaigneufe, et fouvent plate, est la derniére ressource qu'ils emploient pour pulvérifer un Sçavant, assez hardi pour ofer leur dispu ter ce qu'ils ont avancé fans preuves.

Si les beaux efprits se contentoient d'en imposer au vulgaire fur les bagatelles importantes qui les occupent, et que leur orgueil fùt fatisfait d'être les arbitres du gout, ils ne feroient, au moins, qu'inutiles: mais ils prétendent un despotisme fur les objets les plus gra ves. Le Gouvernement, les Moeurs, la Religion même, tout est de leur ressort: il n'est permis de croire que ce qu'ils jugent digne d'être cru. Ils s'annoncent comme tolérans, et font les plus grands perfecuteurs de ceux qui ofent penser autrement qu'eux: ils fe difent citoyens du monde, et ne le font feulement pas de leur patrie, qu'ils ne craignent pas de troubler par les fyftèmes les plus dangereux; ils fe décorent enfin du titre impofant de Philofophes, et c'est tout dire. Ce nom qui dans fon origine ne presentoit à l'esprit qué Vidée d'un Amateur de la fageffe, s'eft acquis par eux

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une fignification bien plus noble. Les Philofophes de l'antiquité n'étoient que les difciples de la fageffe, ils font eux mêmes les vrais Sages; en cette qualité, ils fe font érigés en Legislateurs, non feulement de la Littérature, mais encore de l'administration politique et de la Foi: ils font fondateurs, instituteurs; ils font apôtres; que ne font-ils point! Mais les traits lumineux, repandus dans leurs écrits et dans leurs discours, n'ont qu'une clarté éphémere; ou font plutòt semblables à ces feux brillans qui s'allument dans l'air, qu'un même inftant voit éclore et s'anéantir, il n'en refte aucune trace, et les yeux mêmes qui viennent d'en être éblouis, la cherchent en vain dans le vuide immense qu'elle laisse après elle.

Parini ces nouveaux Licurgues, chacun a fa fecte particuliere, chacun a fes difciples qu'il protège, auxquels il affigne différens lieux pour promulguer les loix. et les maximes. Il arrive quelquefois, à la vérité, que ces difciples moins inftruits, ou de meilleure foi que leurs maîtres, decréditent la secte, et par les absurdités qu'ils debitent, la font paroitre ridicule à ceux dont l' enthousiasme ne s'eft point encore emparé; mais lorsque, les éleves ont coinmis quelque mal-adreffe dans ce genre, les chefs en font quittes pour les abandonner; et cette espece de justice distributive, devient pour le parti un nouveau fujet d'éloges.

Un caractere tel que je viens de le dépeindre, (s'il eft digne d'en porter le nom) paroîtra, fans doute, peu propre à l'amitié, et il feroit fuperflu d'avancer aucune preuve pour en convaincre; aussi ceux qui font poffédés de cette préfomtion effrénée, qui veut tout affujettir, en font-ils incapables. La vanité eft leur unique paffion; ils ne connoiffent de fentiment habituel que celui de la haine. Dévorés fans celle par la jalousie,

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