Imágenes de páginas
PDF
EPUB

I.

PUIS que les Muses (comme toutes autres choses) prennent leur commancement de Dieu : il est raisonnable, que pour bien faire l'œuvre que je commance, mon entrée soit de par lui, et que du tout mon entendement implore son aide et sa grace très saincte. A Reims.

II.

CE n'est pas assés au commancement de tes estudes, ma seur très aimée, de demander l'aide de Dieu : mais il veut que de toutes tes forces tu travailles. Car, ma mie, les anciains ont dit que les Dieus ne donnent leurs biens aus oisifs, mais les vendent par les labeurs. Adieu, et m'aime autant que je t'aime. A Reims.

I.

QUUM musæ (ut cætera omnia) principium a Deo accipiunt, æquum est, ut bene faciam in ea re quam aggredior, meus primus aditus sit per eum, meusque animus imploret auxilium et gratiam Domini sanctissimam.

II.

MARIA SCOTORUM REGINA ELIZABETE SORORI S. P. D.

NoN est satis in principio tuorum studiorum a Deo petere auxilium. Sed ipse vult ut totis viribus labores. Nam, amica summa mea et soror, antiqui dixerunt Deos non dare bona sua otiosis, sed ea vendere laboribus. Bene vale, et me, ut amo te, ama.

III.

JE vous ecrivoi hier (ma seur) que vertu vient de l'estude des bonnes lettres, et pour ce a nous princesses sont-elles plus necessaires qu'aux autres. Car tout ainsi qu'un prince surmonte ses subiects en richesses, en puissance, en autorité et commandement: ainsi doit estre entre tous le plus grand en prudence, en conseil, en bonté, en grace, et toute sorte de vertu. Par quoi les Egyptiains ont paint un œil au sceptre des rois, et disoient que nulle vertu n'est mieus seante à un prince que prudence. A Reims.

IV.

Puis doncques qu'un prince doit surmonter ses subiects non en voluptés et delices, mais en sens, en temperance, et en prudence: et que son devoir et office est de preposer les utilités dela Republique aux siennes; il faut, ma seur, que mettions peine d'estre bien sages. Et que ne laissions aller un seul jour sans apprendre quelque chose. A l'exemple d'Appelles peintre, qui en son art a esté de si grande diligence, qui ne laissoit passer un jour seul, au quel de son pinceau ne tirast quelque ligne. Adieu, et m'aime toujours bien. A Reims.

III.

MARIA REGINA SCOTORUM ELIZABETE SORORI OPTIME S. P. D.

SCRIBEBAM heri, dilectissima soror, quod virtus venit de studio bonarum literarum. Quare eædem sunt magis necessariæ nobis principibus quàm privatis. Nam ut princeps subditis suis vult antecellere divitijs, potestate, autoritate, et imperio: sic debet inter omnes excellere prudentia, consilio, bonitate, gratia, et omni genere virtutis. Qua de re hierogliphica Ægyptiorum notaverunt oculum in sceptro regum, dicebant enim nullam virtutem magis principem decere quàm prudentiam.

IV.

M. R. SCOTORUM ELIZABETE SORORI S. P. D.

QUUM igitur princeps debet antecellere privatis non voluptatibus delicijsve, sed sensu, temperantia, et prudentia: et suum officium anteponere utilitatis reip. suis opus est (soror omnium charissima) nos dare operam ut sapiamus, exemplo Appellis pictoris, qui tanta fuit in arte sua diligentia ut nullus præteriret dies in quo non ipse lineam aliquam penicillo duxisset. Vale, et me ama ut soles.

V.

JE ne me puis assez ebahi de quoi sur les fautes d'autrui nous sommes plus clairs voians qu'Argus, qui avoit cent yeus. Mais pour voir et corriger les notres, nous sommes plus aveugles que la taupe. C'est de quoi se mocque Esope, qui dit qu'en la besace de devant nous portons les vices d'autrui, et en celle qui pend derriere nous mettons les notres. Ne faisons ainsi, ma seur, car celui qui veut parler d'autrui doit estre sans culpe. De Compienne ce 26. Juillet.

VI.

HIER je lisoi une fable en Æsope autant profitable que plaisante. La formis en temps d'hyver faisoit bonne chere du blé qu'elle avoit amassé en esté, quand la cicade aiant grand fain vint à elle, pour lui demander à manger. Mais la formis lui dit, Que faisois-tu en esté? Je chantoi, dit-elle. Si tu chantois en esté, repondit la formis, saulte maintenant en hyver. La fable signifie, ma seur, que pendant que sommes jeunes devons mettre peine d'apprendre des lettres et vertus

« AnteriorContinuar »